Modification de la Loi fédérale sur le service civil

La Conférence gouvernementale des affaires militaires, de la protection civile et des sapeurs-pompiers (CG MPS) soutient le projet de modification de loi soumis, car les mesures proposées peuvent contribuer à court terme à réduire le nombre d’admissions au service civil. La CG MPS ne pense pas que les mesures prévues dans le projet déboucheront sur une diminution substantielle et durable des admissions au service civil. Ces mesures ne réduiront par ailleurs guère l’attrait du service civil.

Notre intention n’est cependant aucunement de mettre des entraves à la possibilité de faire un service civil de substitution pour des raisons de conscience, comme cela est prévu dans la Constitution. Nous n’entendons pas non plus opposer les uns aux autres les instruments du Réseau national de sécurité (RNS). La volonté de la CG MPS est d’offrir à la Suisse et à sa population une protection optimale contre les menaces et les dangers. Pour cette raison, nous proposons des mesures supplémentaires à prendre en compte dans la nouvelle LSC et comme mesures d’accompagnement:

  1. Une clarification de la motivation du dépôt d’une demande d’admission au service civil, orale et conforme aux us actuels, doit être effectuée dans le cadre du recrutement. Comme mesure d’accompagnement, des thèmes relatifs à la politique de sécurité de la Suisse doivent être traités aux degrés scolaires supérieurs.
    Motivation: la suppression de l’examen de conscience, en 2009, a aussi supprimé l’obstacle psychologique de l’entretien personnel. Selon le projet soumis, le service civil doit, à l’avenir aussi, rester ouvert aux personnes qui ne peuvent pas faire de service militaire pour des raisons de conscience. Pour expliquer cette motivation, il suffit au requérant d’envoyer électroniquement une formule remplie[1]. De plus, comme «preuve par l’acte», le civiliste doit faire un service de substitution durant plus longtemps que le service militaire. Aujourd’hui, on ne contrôle pas s’il en va d’un confit de conscience ou, plutôt, d’une mesure d’optimisation du parcours de vie personnel. Dans les faits, la personne astreinte au service militaire a le choix entre le service militaire et le service civil. Les mesures proposées dans le projet de loi soumis ne changent fondamentalement rien à cette situation.
    Le nombre de demandes d’admission au service civil démontre le grand attrait de ce dernier. Cela s’explique vraisemblablement aussi par le niveau plutôt faible de connaissances des instruments de la politique de sécurité de la Suisse dont dispose la jeunesse suisse. Ces lacunes doivent être comblées à l’école. Vu que la formation scolaire à ce niveau est de la compétence des cantons, la Confédération devrait formuler des recommandations idoines pour les futurs plans d’enseignement, à l’attention de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP). La Confédération peut, par ailleurs, mettre à disposition des moyens appropriés, notamment des spécialistes du domaine de la sécurité, pour dispenser l’enseignement relatif à la politique de sécurité au niveau secondaire.
  2. Une demande d’admission au service civil ne doit pouvoir être déposée qu’à partir du recrutement et avant le début de l’école de recrues.
    Motivation: cette mesure donne à l’armée la sécurité de planification nécessaire au sujet de ses effectifs. Les investissements financiers et personnels importants consentis pour la formation de chaque militaire ne seront plus vains à cause des départs dans le service civil après l’école de recrues.
    Pour nous, il est difficilement compréhensible que le Conseil fédéral ait jugé «inappropriées» de telles mesures durables efficacement et les ait rejetées[2]. De l’avis de la CG MPS, il n’est ainsi pas suffisamment tenu compte des enseignements tirés de la révision de l’Ordonnance sur le service civil, en 2011, qui n’a eu aucun effet à moyen terme. Avec le projet de modifications soumis, l’introduction de mesures ayant des effets à long terme est ajournée pour des années.
  3. Les personnes astreintes au service militaire qui sont convoquées pour un service d’assistance ou un service actif ne doivent plus pouvoir déposer de demande d’admission au service civil[3].
    Motivation: pour nous, il est important que l’armée dispose d’effectifs suffisants. Comme réserve stratégique de la Confédération, elle fournit aussi des prestations de soutien aux autorités civiles, en plus des tâches de défense nationale, pour faire face à des menaces graves pesant sur la sécurité intérieure ou à d’autres situations extraordinaires comme des catastrophes ou des situations d’urgence. Toutefois, une personne astreinte au service militaire et entièrement formée devrait malgré tout pouvoir déposer une demande d’admission au service civil au moment de sa convocation justement dans de tels cas[4]. Nous jugeons cela inadmissible.
  4. Un militaire formé comme cadre ou titulaire d’une formation spéciale doit s’engager à remplir la totalité de ses obligations militaires[5].
    Motivation: la formation d’un militaire peut nécessiter d’importants investissements financiers et personnels. Lors du départ d’un cadre ou d’un spécialiste dans le service civil, ces investissements sont perdus. L’armée doit élaborer des modèles contraignant fondamentalement de tels militaires à accomplir l’intégralité de leurs obligations militaires. Des options, comme le remboursement des charges de formation, doivent être examinées d’ici à la fin 2019.
  5. La possibilité que les civilistes fassent leur service à l’étranger doit être supprimée.
    Motivation: le service à l’étranger constitue un accroissement inutile de l’attrait du service civil. De plus, cette possibilité est en contradiction avec l’intention des mesures 5 à 7 du projet de loi soumis, qui ont pour objectif d’améliorer le respect du principe d’équivalence de l’exécution des obligations dans l’armée et dans le service civil. Un militaire ne peut pas non plus accomplir ses obligations dans le cadre d’un service à l’étranger.
  6. Pour résoudre à long terme et durablement les problèmes d’effectifs de l’armée, de la protection civile et du service civil, le modèle «obligation de servir dans la sécurité», mentionné dans le rapport du groupe d’étude du système d’obligation de servir, doit faire l’objet d’un examen circonstancié.
    Motivation: les nombreuses admissions au service civil ont des conséquences non seulement pour l’armée, mais également pour la protection civile. Ainsi, des personnes qui quittaient le service militaire en raison de problèmes à l’école de recrues et devenaient aptes au service de protection civile déposent aujourd’hui fréquemment des demandes d’admission au service civil[6]. De plus, les mesures prises par l’armée pour réduire le nombre de départs induisent une diminution des effectifs de la protection civile[7]. Ces mesures découlent notamment des départs vers le service civil. Le regroupement de la protection civile et du service civil présenté dans le modèle «obligation de servir dans la sécurité» et la création d’une nouvelle organisation (comme un «organe de protection en cas de catastrophe») auraient vraisemblablement pour effets de simplifier le système actuel et de résoudre les problèmes d’effectifs. 

[1] Processus: 1.) enregistrement sur E-civi, 2.) inscription, complément des indications et dépôt de la demande, 3.) participation à la journée d’introduction, 4.) confirmation de la demande, 5.) réception de l’admission, 6.) exécution du service.
[2] Rapport explicatif sur la modification de la Loi sur le service civil, du 20 juin 2018, page 6.
[3] Devient sans objet en cas de mise en œuvre de la recommandation 2.
[4] Art. 1, al. 2: «Les personnes qui ont accompli la totalité des services d’instruction peuvent être admises au service civil si elles sont convoquées à un service d’appui ou à un service actif». Art. 16, al. 2: «Les personnes astreintes au service militaire qui ont accompli la totalité des services d’instruction ne peuvent déposer une demande d’admission que si elles sont convoquées à un service d’appui ou à un service actif.»
[5] Devient sans objet en cas de mise en œuvre de la recommandation 2.
[6] Voir, à ce sujet, OFPP, recrutement et effectifs de la protection civile, fiche d’information, conférence des chefs d’office I-2018, 26-27.03.2018.
[7] Mesures prises par l’armée: augmentation progressive des performances exigées à l’école de recrues, aptitude différenciée, adaptation des profils d’exigences.